Bilan carbone en entreprise : un outil stratégique puissant

Alors que la réglementation nationale en matière d’impact carbone des entreprises se renforce, certains dirigeants ont déjà pris les devants. Découvrez en quoi la réalisation d’un bilan carbone peut être un vrai atout stratégique !
Transition écologique
19.03.2024
Bilan carbone
Depuis le 1er juillet 2023, la réglementation passe à présent au Scope 3 (...) c'est à dire qu'elle intègrera les émissions indirectes des matières premières , des sous-traitants et des fournisseurs et les émissions des produits fabriqués
Philippe Lohézic
Directeur de l'ADECC,

Réalisation d’un bilan carbone : pourquoi prendre de l’avance sur la législation ?

Depuis 2012, toutes les entreprises françaises de plus de 500 salariés sont dans l’obligation de réaliser un bilan GES (gaz à effet de serre). Actuellement, la législation française vise uniquement les émissions (directes et indirectes) liées à la production de l’entreprise, via le bilan “GES Scope 2”.

En 2023, la réglementation a fait un bond en avant. C’est désormais le Scope 3 qui encadre l’analyse des émissions de gaz à effet de serre des professionnels.

Ce nouveau référentiel ajoute les facteurs d’émissions suivants à la liste des éléments pris en compte pour réaliser le bilan : 

  • les émissions de gaz à effet de serre des sous-traitants et fournisseurs de l’entreprise
  • celles des produits fabriqués, et non plus uniquement des matières premières utilisées pour la production.

Pour remplir ces nouvelles obligations, les entreprises ont différents outils à leur disposition. A commencer par la réalisation d’un bilan carbone adapté aux nouvelles contraintes.

Certaines d’entre elles ont choisi d’anticiper, et voient dans le bilan carbone une opportunité stratégique plutôt qu’une simple obligation législative. C’est le cas de Logisseo, une entreprise angevine de logistique de 35 salariés. Pas encore soumise au nouveau bilan carbone, elle a pourtant tout prévu pour réduire son empreinte carbone afin de répondre aux enjeux croissants de décarbonation

 

Plus tôt on démarre le processus, moins on le subit et plus on maîtrise sa mise en œuvre. Cela nous permet de faire les choses progressivement, au lieu de devoir tout faire d’un coup dans 10 ans quand on sera rattrapé par la législation.
Hélène Grellier
Gérante, Logisseo

Prendre le temps nécessaire pour transitionner, s’organiser en interne, adapter les relations avec ses fournisseurs et sous-traitants : les raisons de prendre un peu d’avance sur la législation en termes de bilan carbone sont nombreuses et propres à chaque organisation.

Pourtant, la réalisation d’un bilan carbone d'entreprise est avant tout motivée par des raisons stratégiques, parmi lesquelles : 

  • se positionner de manière compétitive au sein d’un marché, 
  • construire une stratégie à long terme qui prend en compte les changements climatiques à venir, 
  • réaliser des économies.

Être en avance sur son marché 

Ces dernières années, la législation française va dans le sens d’une diminution des émissions de GES. L’Accord de Paris en 2015, puis la stratégie nationale bas carbone (SNBC) visent en effet la neutralité carbone d’ici 2050.

Benoit Buffry, directeur des opérations de la société angevine Mobeetip, qui accompagne les entreprises dans la réalisation de leur bilan carbone,  le confirme : “il y a des enjeux économiques et réglementaires très pragmatiques.” Ce sera d’autant plus le cas avec l’instauration du GES Scope 3, qui va obliger les entreprises à intégrer des indicateurs concernant les émissions provenant des produits et services de leurs fournisseurs et sous-traitants dans leur bilan carbone.

Stéphane Lecointe, chargé de mission décarbonation de l’industrie à l’ADEME des régions Bretagne et Pays de Loire, estime qu’avoir des indicateurs carbone en nette amélioration permet aujourd’hui de se démarquer d’un point de vue commercial, notamment en tant que fournisseur”. 

 

C’est aussi un atout marketing et en matière de recrutement : être en cohérence avec ce mouvement de fond de la société peut donner envie aux clients et aux potentiels salariés de venir et de rester.
Stéphane Lecointe
chargé de mission décarbonation de l’industrie, ADEME

De fait, l’aspect économique de la mise en place d’un bilan carbone représente l’une des premières motivations des entreprises. Pour autant, la notion d’engagement écologique s’intègre de plus en plus dans leurs valeurs. A titre d’exemple, l’entreprise choletaise Bodet (920 salariés et 123,9 M€ de CA en 2022), spécialiste de la gestion du temps, vient de réaliser son premier bilan carbone. Sa responsable qualité et développement durable, Gaelle Leca, l’affirme : “pour nous, c’est la suite logique d’une démarche environnementale engagée depuis plus de dix ans.”

De son côté, Hélène Grellier considère que son engagement dans la réduction des émissions de carbone de Logisseo est stratégique, certes, mais également important d’un point de vue environnemental. Pour elle, “chaque petite graine semée chez mes salariés ou chez nos clients est positive.” 

Adopter une stratégie à long terme 

D’un point de vue pragmatique, les audits et bilans carbone sont pour les entreprises un moyen concret d’objectiver leurs choix stratégiques pour les années à venir. Benoit Buffry le rappelle : “au départ, la méthodologie du bilan carbone est pensée comme un exercice d’analyse de vulnérabilité des organisations face au changement climatique”.

En bref, l’objectif premier d’un bilan carbone d’entreprise est de se demander : “à quels risques est exposée la structure à court, moyen ou long terme ?”. Pandémie, guerre en Ukraine, sécheresses, inondations, tempêtes, les événements survenus en France ces dernières années démontrent une difficulté à évaluer les risques et leurs conséquences sur le système économique et industriel. Il convient donc de s’y préparer au mieux, afin de s’y adapter rapidement en cas de nécessité. Gaelle Leca en est convaincue : “même si l’on ne connaît pas encore les retombées de ce travail de bilan carbone, il fait désormais partie de la stratégie à long terme du groupe Bodet et jouera certainement un rôle dans la pérennité de notre compétitivité”.

Cependant, selon Benoît Buffry, les entreprises volontaires de s’engager dans l’évaluation de leurs émissions de GES ont “besoin de s’appuyer sur des mesures régulières des données et sur une vision à long terme” pour quantifier et hiérarchiser les risques afin d’identifier et de mettre en œuvre des solutions concrètes. 

Suivre un plan d’action précis pour réaliser des économies 
 

Nous l’avons vu : l’objectif final d’un bilan carbone d’entreprise, c’est l’établissement d’un plan stratégique adapté aux enjeux environnementaux actuels. Cependant, il est possible de mettre en place des actions très concrètes grâce aux différentes mesures effectuées durant la comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre. Hélène Grellier en témoigne : “depuis trois ans, à chaque nouveau bilan, nous affinons nos données et ajustons notre plan d’action en fonction.” En 2023, les émissions de GES de Logisseo ont d’ailleurs baissé de 2 %. Aujourd’hui, la structure met en œuvre différentes stratégies pour diminuer les émissions liées au transport.

Bilan carbone

De son côté, le groupe Bodet est encore au début du travail : “pour le moment, nous avons identifié les postes les plus émetteurs : ce sont les achats, les déplacements et l’énergie”, “il nous reste maintenant à élaborer notre feuille de route de transition pour 2024/2028”, détaille Gaëlle Leca.

Pas de doute : la mise en place d’un bilan carbone d’entreprise est donc bel et bien une démarche progressive, même si beaucoup de structures entament le travail par un questionnement sur leur niveau de consommation d’énergie. Stéphane Lecointe rappelle que les entreprises peuvent solliciter différents acteurs de l’accompagnement à la transition énergétique pour réaliser leur bilan carbone.

Sur ce volet, l’ADEME déploie des outils d’accompagnement et financiers comme le diagnostic Décarbon’Action en lien avec Bpifrance, le programme Pacte Industries ou le Fonds Chaleur.
Stéphane Lecointe
chargé de mission décarbonation de l’industrie, ADEME

Transition écologique : bien se faire accompagner

En complément du soutien proposé par l’ADEME, les entreprises peuvent également faire appel à la CCI, des associations comme Orace ou l’ADECC ou encore des entreprises spécialisées comme Mobeetip pour réaliser leur bilan carbone et commencer la transition écologique de leur entreprise !

Comment savoir par où commencer et passer à l'action tout en restant compétitif ? Les conseillers CCI sont là pour accompagner les entreprises du territoire, de la mise en place de premiers gestes accessibles jusqu'à l'intégration des enjeux climat et RSE au cœur de leur stratégie d'entreprise. La CCI propose une offre complète d’accompagnement d’entreprise pour réussir sa transition écologique

  • connaissance de la réglementation (Loi PACTE, Loi climat et résilience, DPEF, CSRD, ...), 
  • mesure de l'impact environnemental de leur activité, 
  • ou encore méthodes pour devenir une entreprise à mission et/ou repenser leur business model.
Gauthier Bedek, responsable innovation Eram

Même si la méthode du bilan carbone peut s’avérer laborieuse à mettre en place, tout s’arrange généralement une fois les bons process enclenchés, se faire accompagner est la clé d’une analyse pertinente et bien orientée. 

Nous recommandons aux chefs d’entreprise encore hésitants de commencer avec par exemple un accompagnement sur l’efficacité énergétique avec l’association Orace et de suivre le parcours collectif avec un atelier empreinte carbone organisé par l’ADECC pour être autonome dans la réalisation de son bilan simplifié et de savoir mesurer l’impact carbone de ses actions.
Philippe Lohézic ,
directeur de l’ADECC

L'ADECC en chiffres

1,5 million d'euros
d'économies réalisées
4 500
tonnes de matières mieux valorisées
+3 500
participants aux rencontres
1 600
tonnes équivalent CO2 évités (900 allers/retours Paris New-York)

La CCI fait aussi son bilan carbone

La CCI s’empare elle aussi de la question de ses émissions de carbone. A ce sujet, Amélie Bossard, directrice RSE de la CCI Maine-et-Loire et de la Mayenne, estime : “nous avons une responsabilité à nous aligner sur la trajectoire proposée et même à être proactif.”

Grâce à l’outil “Climatip” de l’entreprise angevine Mobeetip, la CCI a pu identifier les 5 postes les plus émetteurs de GES dans ses différentes activités :

  • Les déplacements de ses salariés et visiteurs sur sites ; 
  • Les achats ; 
  • Les immobilisations (travaux ou réaménagement de bâtiments) ; 
  • Les prestations de services ; 
  • La consommation d’énergie.

Ainsi, les émissions liées aux déplacements peuvent s’améliorer en repensant plus largement les mobilités alternatives à l'auto solisme : covoiturage, incitation à l’utilisation des transports en commun, télétravail. La feuille de transition de la CCI sera prête en septembre 2024.

Découvrir le bilan carbone de la CCI Maine-et-Loire

En attendant, la CCI continue d’accompagner la transition écologique des TPE/PME et des PMI sur tout le territoire français, via la mobilisation de dispositifs publics ou d’accords-cadres adaptés aux enjeux spécifiques de chaque structure. 

 

Un article inspiré du magazine Anjou Eco n°74 - février 2024. 
 

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